L’éco-responsabilité dans le secteur des cosmétiques est en plein essor à travers le monde. En Afrique, cette tendance prend une dimension particulière. Elle s’appuie sur un patrimoine naturel et sur une demande croissante pour des produits authentiques et respectueux de la peau. Mais, quels sont les défis auxquels fait face cette approche verte du marché cosmétique et quelles solutions pour y faire face ? Avant de répondre à cette question, nous vous faisons découvrir ce qu’est l’éco-responsabilité ainsi que son importance pour les cosmétiques en Afrique. Bonne lecture !
L’éco-responsabilité dans les cosmétiques en Afrique : mieux comprendre le principe
C’est quoi un cosmétique éco-responsable ? Il s’agit d’un produit de beauté qui respecte la peau, l’environnement, mais aussi les animaux.
En général, l’éco-responsabilité d’une marque ou d’un produit de beauté s’évalue sur 5 critères :
- la dimension biologique et naturelle des ingrédients
- la dimension sociale avec, par exemple, un engagement en faveur du commerce équitable
- la dimension locale avec, par exemple, des produits fabriqués en Afrique
- la dimension écologique, avec des méthodes de fabrication respectueuses de l’environnement, des emballages recyclables, biodégradables ou compostables et des ingrédients naturels qui ne polluent pas l’environnement
- la dimension de la protection des animaux avec le refus d’essais ou d’ingrédients dérivés d’animaux.
Dans les faits, beaucoup de marques du secteur de la beauté sont loin d’avoir associer éco-responsabilité et cosmétiques en Afrique.
L’impact du secteur des cosmétiques sur l’environnement
La fabrication de cosmétiques est une activité qui mobilise de nombreuses ressources. Sans de meilleures pratiques éco-responsables, elle a le même impact que la fast-fashion. Elle épuise les ressources à toutes les étapes du processus telles que la formulation ou le packaging.
La formulation
Des études ont prouvé qu’environ 70% des produits de beauté contiennent de l’huile de palme. Considéré comme un émulsifiant respectueux de la peau, cet ingrédient naturel provient souvent des plantations d’huile de palme en Afrique et en Asie du Sud-Est.
La culture de l’huile de palme contribue à la déforestation généralisée sur notre planète. L’industrie de l’huile de palme serait responsable de 20% de la déforestation mondiale.
Par ailleurs, l’une des plus grandes ressources consommées par l’industrie de la beauté est l’eau. En 2020, environ 10,4 millions de tonnes d’eau ont été utilisées dans l’industrie mondiale de la beauté. Le marché des cosmétiques est également considéré comme l’un des plus grands contributeurs de la consommation d’eau, de la pollution des océans et des eaux usées.
De même, l’utilisation d’énergie dans la fabrication des émulsions, la forme cosmétique la plus courante aurait un effet beaucoup plus important sur les émissions de carbone que la source des matières premières. Il est possible de réduire la consommation d’énergie de plus de 80 % en fabriquant les émulsions à l’aide d’une méthode nécessitant moins de chaleur. Une méthode que peu d’entreprises de cosmétiques ont implémenté.
Le packaging
Les marques de beauté utilisent généralement du plastique pour l’emballage de leurs produits. Il s’agit d’une matière simple à fabriquer et plus abordable que d’autres options. Cependant, les retombées environnementales du plastique ne sont plus à présenter. Selon Plastic Soup, les ingrédients de plus de 7000 produits de beauté et ont constaté que seulement 13 % étaient exempts de microplastiques.
La faune est aussi touchée par la production et l’élimination des produits cosmétiques. Une grande quantité de déchets d’emballage en plastique finit par se retrouver dans nos rivières et nos océans, ce qui représente une menace sérieuse pour les espèces marines.
Le naturel parfois trompeur
L’industrie cosmétique consomme d’importantes quantités d’ingrédients, qu’ils soient issus de l’agriculture, de la récolte, du traitement ou de la synthèse en laboratoire. Cependant, les données précises sur ces volumes restent inconnues, selon Lorraine Dallmeier, directrice de Formula Botanica, une école spécialisée dans les soins de la peau. Les produits hydratants, tels que les lotions qui contiennent de l’eau ou des composants hydrosolubles, nécessitent des conservateurs pour garantir leur stabilité et leur sécurité d’utilisation. En fait, bien que les ingrédients naturels puissent sembler plus écologiques, ils génèrent souvent une empreinte carbone supérieure à celle des ingrédients de synthèse. Il est important de se rappeler que l’agriculture, source de ces ingrédients naturels, demande une consommation élevée de ressources.
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Eco-responsabilité et cosmétiques en Afrique : le continent fait-t-il mieux que le reste du monde ?
Il est vrai que l’Afrique dispose de nombreux atouts qui la positionnent favorablement en matière de cosmétique verte. Découvrons en quelques-uns :
Les atouts de l’Afrique
- La phytothérapie : de nombreuses cultures africaines utilisent depuis des siècles des plantes locales pour leurs propriétés cosmétiques et thérapeutiques. Ce savoir ancestral représente un riche réservoir d’ingrédients naturels.
- Une biodiversité exceptionnelle : le continent africain abrite une faune et une flore très diversifiées, offrant une palette d’ingrédients naturels variés et souvent uniques.
- Un marché en croissance : la demande pour des produits cosmétiques naturels et éthiques est en constante augmentation en Afrique, poussant les entreprises à développer des formulations plus respectueuses de l’environnement et de la santé.
- Un potentiel pour l’économie circulaire : l’utilisation de matériaux locaux et de pratiques de production traditionnelles peut favoriser une économie circulaire et réduire l’empreinte écologique de l’industrie cosmétique.
Cependant, il ne faut pas idéaliser la situation, car les défis sont là.
Eco-responsabilité et cosmétiques en Afrique : les défis du secteur
Le continent fait face à de nombreux défis qui pourraient entraver le développement d’un secteur de cosmétiques éco-responsables à grande échelle.
On parle entre autres de :
- Manque de réglementation : dans la plupart des pays, la réglementation en matière de cosmétiques est encore peu développée, ce qui peut conduire à des pratiques et à la commercialisation de produits de qualité douteuse.
- La concurrence des produits industriels : les produits cosmétiques industriels, souvent moins chers et plus facilement accessibles, continuent d’attirer une part importante des consommateurs.
- Les difficultés d’accès aux marchés : les petites entreprises de cosmétique naturelle ont souvent du mal à accéder aux marchés et à se faire connaître face aux grandes marques internationales.
- Les enjeux environnementaux : l’exploitation non durable des ressources naturelles, la pollution et le changement climatique représentent des défis majeurs pour la production de cosmétiques naturels en Afrique.
L’Afrique dispose d’un potentiel énorme pour développer une industrie cosmétique éco-responsable et durable. Mais, il est essentiel de mettre en place les conditions nécessaires pour que ce potentiel se réalise pleinement.
Eco-responsabilité et cosmétiques en Afrique : comment en faire une réalité ?
Vulgariser l’éco-responsabilité dans le secteur des cosmétiques en Afrique ne repose pas seulement sur les marques. C’est aussi l’affaire des gouvernements et des consommateurs.
Les consommateurs
Pour les consommateurs, il peut être difficile de faire des choix, car tout ce qui est décrit comme “durable”, “bio” , “eco-responsable” est souvent moins accessible. Ainsi donc, les prix plus élevés des produits de beauté dits “durables” les positionnent comme des produits de luxe.
Or, pour qu’un produit soit réellement durable, il doit être équitable. Il faut donc repenser notre approche des cosmétiques dans une perspective durable. La durabilité est une responsabilité partagée entre les marques et les consommateurs, et elle implique une utilisation réfléchie et consciente des produits. Un produit n’est véritablement durable que s’il est utilisé de manière à respecter cet engagement envers la durabilité. C’est une transformation profonde de la manière dont nous considérons la consommation et l’impact environnemental des produits de soins de la peau.
Même si des labels spécifiques à l’Afrique sont encore rares, il est possible de trouver des produits de beauté naturels et biologiques de qualité sur le continent. En privilégiant les marques engagées, en lisant les étiquettes et en vous renseignant sur les ingrédients, vous ferez un choix conscient et soutiendrez l’économie locale.
Les institutions
Le gouvernement et les institutions africaines opérant dans le secteur de la beauté ont un rôle à jouer pour la croissance et l’essor de l’éco-responsabilité en Afrique. Voici quelques actions à impérativement mettre en place :
- Le renforcement des réglementations : Il est nécessaire de mettre en place des normes claires et rigoureuses pour garantir la qualité et la sécurité des produits cosmétiques naturels.
- Le soutien aux entreprises locales : les gouvernements et les organisations internationales doivent soutenir les petites entreprises de cosmétique naturelle en leur offrant un accès au financement, à la formation et aux marchés.
- La promotion de la recherche et de l’innovation : Il est important d’investir dans la recherche pour développer de nouveaux produits et de nouvelles technologies respectueuses de l’environnement.
- La sensibilisation des consommateurs : Il est essentiel d’informer les consommateurs sur les bienfaits des produits cosmétiques naturels et sur les enjeux de la cosmétique écoresponsable.
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Eco-responsabilité et cosmétiques en Afrique : comment y arriver ?
Une bonne partie du travail revient évidemment aux marques de cosmétiques made in africa. Voici quelques points à retenir :
1. Sourcing local et durable des ingrédients
- Privilégier les ingrédients locaux : utiliser les trésors naturels de l’Afrique tels que le karité, l’argan, le baobab, les plantes médicinales locales, etc. Cela réduit l’empreinte carbone liée au transport et soutient les communautés locales.
- S’assurer d’une production agricole biologique : encourager les producteurs locaux à adopter des pratiques agricoles biologiques pour préserver la biodiversité et limiter l’utilisation de produits chimiques.
- Établir des relations équitables avec les fournisseurs : garantir des prix justes et des conditions de travail décentes aux producteurs.
2. Processus de fabrication respectueux de l’environnement
- Choisir des énergies renouvelables: privilégier l’énergie solaire, éolienne ou hydraulique pour alimenter les installations de production.
- Optimiser la consommation d’eau: mettre en place des systèmes de récupération et de traitement des eaux usées.
- Limiter la production de déchets: réduire les emballages, privilégier les matériaux recyclables ou biodégradables, et mettre en place des programmes de recyclage.
3. Emballages éco-conçus
- Réduire le volume des emballages: optimiser les formats pour limiter les déchets.
- Choisir des matériaux écologiques: utiliser du verre recyclé, du bambou, du carton certifié FSC, etc.
- Privilégier les emballages rechargeables: encourager l’économie circulaire en proposant des recharges pour les produits.
4. Communication transparente et responsable
- Informer les consommateurs: communiquer clairement sur les ingrédients utilisés, les méthodes de production et l’engagement de la marque en faveur de l’environnement.
- Mettre en avant les certifications: si la marque dispose de certifications (COSMOS, Ecocert, etc.), les communiquer largement pour rassurer les consommateurs.
- Sensibiliser à l’écologie: organiser des ateliers, des événements ou des campagnes de sensibilisation pour informer sur les enjeux environnementaux et les gestes éco-responsables.
5. S’engager pour le futur des sociétés
- Soutenir les communautés locales: investir dans des projets de développement durable, soutenir des associations locales, etc.
- Lutter contre la pauvreté: créer des emplois locaux et favoriser le développement économique des régions où la marque est implantée.
- Protéger la biodiversité: soutenir des projets de conservation de la nature et de protection des espèces menacées.
6. Collaborer avec des acteurs locaux
- S’associer avec d’autres entreprises: créer des synergies avec d’autres acteurs de la cosmétique, de l’agriculture biologique ou de l’environnement pour développer des projets communs.
- Travailler avec des artisans locaux: valoriser le savoir-faire artisanal et contribuer à la préservation des traditions locales.